L'OIAC va enquêter sur l'attaque chimique présumée en Syrie







L’Organisation internationale sur les armes chimiques (OIAC) a annoncé mardi l’envoi “sous peu” en Syrie d’une équipe pour enquêter sur une attaque chimique présumée imputée au régime de Bachar al-Assad qui se trouve en “état d’alerte” après les menaces d’une riposte militaire occidentale.
Les mises en garde de Donald Trump affirmant que les responsables de l’attaque présumée devraient “payer le prix fort” ont ravivé le spectre de frappes américaines en Syrie, qui pourraient donner lieu à une confrontation avec Moscou, l’allié indéfectible de Bachar al-Assad.
La Russie, dont les troupes sont sur le sol syrien, a d’ores et déjà prévenu qu’une intervention militaire américaine serait “très, très dangereuse”.
Lundi, l’ambassadeur syrien à l’ONU, Bachar al-Jaafari, avait accusé les Etats-Unis, la France et d’autres pays occidentaux de professer de fausses accusations contre Damas “de façon à ouvrir la voie à une attaque en Syrie comme l’agression criminelle des Etats-Unis et de la Grande-Bretagne en Irak en 2003”.
Et mardi, Damas a invité l’OIAC pour enquêter à Douma, dernier bastion rebelle dans la Ghouta orientale aux portes de Damas où l’attaque chimique présumée aurait fait des dizaines de morts samedi.
“L’équipe se prépare à se déployer en Syrie sous peu”, a répondu l’OIAC, un organisme dont le mandat est d’enquêter sur une attaque présumée mais qui n’a pas la responsabilité d’en identifier les responsables.
Selon des diplomates, l’envoi d’experts de l’OIAC en Syrie pourrait permettre à Damas de retarder d’éventuelles frappes.
Trump: des décisions majeures “très bientôt”
Qualifiant l’attaque présumée d'”horrible”, le président américain Donald Trump a promis que son pays y répondrait “avec force”, prévoyant des décisions majeures “très bientôt”.
La Maison Blanche a estimé que Damas ne pouvait mener à bien une telle attaque sans l’aide de ses alliés russe et iranien.
Ces derniers accusent Washington et les puissances occidentales de chercher un “prétexte” pour frapper le régime syrien.
Dans ce contexte très tendu, le Conseil de sécurité de l’ONU doit voter à 19H00 GMT sur deux projets rivaux de résolution.
Le premier, à l’initiative des Etats-Unis, est un texte créant un mécanisme d’enquête sur l’emploi d’armes chimiques en Syrie, mais il est fort probable qu’il se heurte à un véto russe. Le deuxième est un document évoqué plus tôt par le chef de la diplomatie russe, Sergueï Lavrov, qui soutiendrait un déploiement de l’OIAC.
L’armée syrienne “en état d’alerte”
Face au risque d’attaques, l’armée syrienne a placé ses forces “en état d’alerte” pour les trois jours à venir dans les aéroports et les bases militaires du pays, selon l’Observatoire syrien des droits de l’Homme (OSDH).
Cette mesure est généralement adoptée “en réaction à des menaces extérieures”, a précisé le directeur de l’Observatoire, Rami Abdel Rahmane.
Une source des forces alliées au régime a affirmé à l’AFP que le régime serait prévenu en cas d’attaque.
“Généralement, les Américains avertissent les Russes par avance, c’est ce qui s’est passé il y a un an. A l’époque, les Russes avaient informé les autorités syriennes”, a-t-elle indiqué.
En avril 2017, Donald Trump avait déjà fait bombarder une base militaire syrienne, en riposte à une attaque au gaz sarin imputée au régime, qui avait tué plus de 80 civils à Khan Cheikhoun (nord-ouest).
“Personne n’a peur d’une frappe”
Dans les rues de la capitale, des Syriens semblaient rester de marbre face aux menaces de frappes.
“Personne n’a peur d’une frappe”, lance sur un ton de défi Amal, ingénieure de 27 ans. “On sait que tout ce qu’ils font, c’est pour miner (…) l’engagement de l’armée qui libère les régions” tenues par la rébellion.
“Honnêtement, je n’ai pas peur d’une frappe américaine. Après sept ans de ce qu’on a vu avec la guerre (…) il n’y a plus de peur”, lâche de son côté Rahf, une étudiante.
Selon les Casques Blancs, les secouristes en zones rebelles, et l’ONG médicale Syrian American Medical Society, plus de 40 personnes ont été tuées samedi à Douma, tandis que plus de 500 blessés ont été soignés, souffrant notamment de “difficultés respiratoires”.
Les forces du régime empêchant tout accès à Douma, les journalistes ne peuvent pas vérifier de manière indépendante ces accusations. Joindre par ailleurs des gens sur place est rendu difficile par les mauvaises communications. L’AFP n’a plus de correspondants à Douma, toujours sous le contrôle des rebelles.
Le dernier groupe insurgé Jaich al-Islam semble cependant en passe de quitter la ville après plusieurs semaines de bombardements intensifs du régime qui ont fait plus de 1.700 morts dans les secteurs rebelles de la Ghouta orientale.
Une soixantaine de bus transportant des combattants de Jaich al-Islam et des civils de Douma ont quitté dans la nuit de lundi à mardi la périphérie de Damas pour se rendre en territoire rebelle dans le nord, selon l’OSDH.
Avant eux, des dizaines de milliers de personnes, combattants de deux autres groupes insurgés et leurs familles, avaient déjà été évacués.
Le conflit qui déchire la Syrie depuis 2011 a fait plus de 350.000 morts et s’est complexifié au fil des années avec l’implication de puissances étrangères sur un territoire morcelé.
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